Déchu par l’Assemblée nationale, le Premier ministre Sylvestre Ilunga refuse de démissionner. Dans une correspondance adressée mercredi 27 janvier, au Président Félix Tshisekedi, le chef du gouvernement affirme qu’il ne démissionnera pas « avant l’élection et l’installation du Bureau définitif de l’Assemblée nationale ».
Cette lettre est en effet le rapport de sa mission à Lubumbashi, où il dit avoir eu des échanges avec l’ancien Président de la République, Joseph Kabila et les différentes communautés du Grand Katanga
Cette position du Premier ministre, Sylvestre Ilunga est soutenue par les députés du Front commun pour le Congo (FCC), plateforme de Joseph Kabila. Ils ne reconnaissent pas au Bureau d’âge de l’Assemblée nationale la compétence d’examiner une motion de censure contre le gouvernement et qualifient cette destitution de non-évènement.
D’après l’article 147 de la Constitution, Sylvestre Ilunga devrait déposer sa démission dans les 24 heures qui suivent sa destitution.
Cet article dispose: « Lorsque l’Assemblée nationale adopte une motion de censure, le Gouvernement est réputé démissionnaire. Dans ce cas, le Premier ministre remet la démission du Gouvernement au Président de la République dans les vingt-quatre heures. »
Les cartes de Tshisekedi
Si le Premier ministre n’est pas d’accord, comme c’est le cas, il peut refuser de démissionner, ce qui va plonger le pays dans une crise entre l’Assemblée nationale et le gouvernement.
Dans un tel cas de figure les possibilités suivantes sont offertes au Président de la République, garant du bon fonctionnement des Institutions.
Félix Tshisekedi peut donc nommer un nouveau formateur du gouvernement issu de la nouvelle majorité en vertu de l’article 78, qui dispose :
« Le Président de la République nomme le Premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci. Il met fin à ses fonctions sur présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement… »
Mais il peut également prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale, conformément à l’article 148 de la Constitution. Ce texte stipule :
« En cas de crise persistante entre le Gouvernement et l’Assemblée nationale, le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des Présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale… »
Les marges de manœuvres de Sylvestre Ilunga
Dans tous ces cas de figure, le Premier ministre Sylvestre Ilunga Ilunkamba est libre de saisir la Cour Constitutionnelle, soit pour contrôler la constitutionnalité de l’acte de la destitution de son gouvernement, posé par l’Assemblée nationale, en vertu de l’article 160 :
« … Aux mêmes fins d’examen de la constitutionnalité, les lois peuvent être déférées à la Cour constitutionnelle, avant leur promulgation, par le Président de la République, le Premier ministre, le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat ou le dixième des députés ou des sénateurs. La Cour constitutionnelle statue dans le délai de trente jours. Toutefois, à la demande du Gouvernement, s’il y a urgence, ce délai est ramené à huit jours. »
Sylvestre Ilunga peut aussi faire recours en interprétation de la Constitution, s’il voulait contester la décision qui sera prise par le Chef de l’Etat, conformément à l’article 161.
Ce texte dispose : « La Cour constitutionnelle connaît des recours en interprétation de la Constitution sur saisine du Président de la République, du Gouvernement, du Président du Sénat, du Président de l’Assemblée nationale, d’un dixième des membres de chacune des Chambres parlementaires, des Gouverneurs de province et des Présidents des Assemblées provinciales (…) »
Transmission de la résolution
Pour permettre au Président de la République de prendre des dispositions conséquentes même si le Premier ministre ne déposait pas sa démission dans les 24 heures, l’Assemblée nationale a adopté, lors de la plénière de mercredi 27 janvier, une résolution déclarant la déchéance du gouvernement.
Cette résolution sera transmise ce jeudi 28 janvier, au Président de la République, à la Cour constitutionnelle et au gouvernement pour toutes fins utiles, explique le président du Bureau d’âge de l’Assemblée nationale, Christophe Mboso Nkodia.